Jeu vidéo / Deus Ex : Human Revolution

Date de sortie
Développeur
Eidos Montréal
Éditeur
Square Enix
Mode de jeu
Type de jeu
RPG
Thème du jeu
Action

Test de Deux Ex Human Revolution

Tous ceux qui ont survécu au bug de l’an 2000 ont eu l’occasion de découvrir Deus Ex développé par Ion Storm. Encore aujourd’hui, il peut se vanter de faire partie des meilleurs FPS solo. Quatre ans plus tard, le studio livre une suite, Invisible War, et devient rapidement le symbole du clivage entre joueurs PC et joueurs console. Salué pour son scénario mais critiqué pour son gameplay, nous avions là l’exemple type du jeu simplifié pour les consoleux. Déçue, la communauté PC n’attendait plus rien d’un troisième opus, annoncé seulement six mois après la sortie d’Invisible War. Ion Storm ferme ses portes en 2005 et ce n’est que deux ans plus tard, en 2007, que l’éditeur de Deus Ex, Eidos Interactive, annonce une suite développée dans leurs studios de Montréal. Le rachat d’Eidos Interactive par Square Enix rendra le développement fébrile, le temps d’une restructuration. 26 août 2011, Deus Ex Human Revolution investit les rayons des boutiques françaises.

Un scénario complexe, travaillé et intéressant

Deus Ex Human Revolution PC - Screenshot 11
Les villes sont joliment modélisées

Deux Ex Human Revolution s’inspire essentiellement du premier épisode plutôt que son controversé prédécesseur. L’intrigue se déroule 25 ans avant les faits narrés dans Deus Ex, vous incarnez Adam Jensen, chef de la sécurité au sein de Sarif Industries et ancien membre du SWAT. Durant le tutorial, vous faites face à une attaque dans les laboratoires de la société, Adam est laissé pour mort. David Sarif, votre patron, décide sans votre consentement de remplacer tous vos membres blessés par des membres bioniques. Désormais augmenté, c’est là que commence réellement l’aventure, vous devez enquêter sur l’attaque qui a coûté la vie à plusieurs scientifiques dont Megan Reed, votre amante. Adam va enchaîner les missions, commençant à Détroit où la pauvreté a envahi les rues, il visitera Hengsha, une cité chinoise tellement gigantesque qu’ils ont choisi de superposer les quartiers. Ceux sont les deux villes visitables, Jensen aura l’occasion de faire le tour d’un immeuble à Montréal et de faire une virée à Singapour. Raconté comme cela, le scénario semble simple, mais nous sommes dans un Deus Ex, le scénario est mêlé de conspiration et de quêtes annexes qui ne s’éloignent pas du sujet principal de Human Revolution. Ce titre est à double sens, nous sommes effectivement à l’aube d’une révolution. D’abord, une révolution technologique, le transhumanisme quitte le stade de la théorie pour celui de la pratique, ce qui engendre une autre révolution, une lutte entre les transhumanistes et ceux qui refusent de se transformer en moitié homme moitié machine. Le sujet est on ne plus intéressant et l’histoire de notre personnage permet d’avoir une vision relativement neutre de la situation puisque vous travaillez pour Sarif Industries, fabricant d’augmentations, et en même temps, vous vous retrouvez avec ces mêmes augmentations involontairement. Adam va durant son périple forger sa propre opinion (la vôtre) et œuvrer dans son sens.

Une bonne immersion à l’ambiance cyberpunk

Deus Ex Human Revolution PC - Screenshot 12
Wahou ! C'est la folie dans la ruche

Un tel scénario incombe une grande responsabilité à Eidos Montreal, nous offrir une liberté et une immersion totale. Dès le début du jeu, vous découvrez un environnement riche et d’une étonnante crédibilité, rien ne semble être placé au hasard, les détails sont nombreux et sont autant d’occasion de faire des clins d’œil au premier épisode de la série : le ballon de basket dans Détroit, des post-it qui traînent un peu partout, des codes d’accès… Les quêtes annexes comme les missions sont particulièrement travaillées, il n’y a pas un défaut capable de vous pousser à jeter votre souris par la fenêtre. L’immersion est des plus totales une fois libre de nos mouvements, nous découvrons des rues, des appartements, des entrepôts, des bureaux, des lieux vivants (plus ou moins) et travaillés. L’ensemble est élégant, le moteur graphique réalise un travail correct mais souffre de nombreuses déficiences, les effets d’ombre et de lumière sont limités, les skybox sont capables du pire comme du meilleur et le moteur physique se contente du strict minimum, il n’y a que les caisses, quelques poubelles (pas toutes !) et quelques objets électroménagers que vous pourrez déplacer à votre convenance. Il y a de quoi mettre en valeur le scénario et en même temps, il y a des regrets.

Un RPG dans les grandes lignes

Deus Ex Human Revolution PC - Screenshot 13
Effectivement, je pourrai faire ça

Le fer de lance d’un Deus Ex est d’intégrer des éléments de RPG à ceux du FPS. Le pari est réussi mais manque de consistance. Par exemple, la notion de choix, Adam prend finalement parti dans le dernier des quinze chapitres, il n’est pas question tout au long du jeu de rejoindre les humains dans leur lutte contre les augmentations entre autre, vous êtes et resterez l’employé docile de Sarif Industries. Finalement, lorsque l’on rejoue une seconde fois à Human Revolution, nous vivons le même scénario, nous savons exactement ce qu’il se passera ensuite, seule l’approche en terme de gameplay sera susceptible de changer. Pourtant, l’intrigue offrait tout un panel de possibilités, ici, les personnages secondaires sont rarement mis en avant, nous en savons plus sur la conjoncture mondiale que sur la vie de nos collègues les plus proches. Heureusement, quelques quêtes annexes permettront d’en savoir plus sur eux et sur Adam. Les variantes scénaristiques sont proches du ridicule, dans quasiment tous les cas, vous pouvez faire un choix, découvrir son résultat, recharger la partie et choisir l’autre choix, les différences à long terme sont minimales et tiennent du détail, dans certaines situations, vous ne vous rendrez même pas compte de la différence. La fin du jeu est à cette image, après le boss final et une sauvegarde, vous pourrez découvrir en quelques minutes les quatre fins disponibles. Certes, c’est du même acabit que le premier jeu de la série et nous pouvons saluer la séquence où vous pourrez prendre une décision lourde de conséquence et la payer à un moment crucial de la partie, mais dix ans ont passé et le résultat paraît maigre face au ténor du jeu de rôle actuellement, The Witcher. Toutefois, cela ne vous empêchera pas de vivre une première fois une aventure excellente et puis il s’agit avant tout d’un FPS dont le gameplay est probablement plus complet que celui d’un RPG.

Sur les traces de Deus Ex

Deus Ex Human Revolution PC - Screenshot 14
Ne me demandez pas comment nous en sommes arrivés là

Human Revolution ne tombe pas dans les travers d’Invisible War, les niveaux sont bien conçus et selon vos augmentations, vous pourrez appréhender un lieu de nombreuses manières. Accéder à une pièce en démolissant un mur est tout à fait envisageable, un grillage de deux mètres n’est pas si inaccessible que cela quand vous pouvez faire des bons de trois mètres et vous pourriez aussi facilement vous jeter d’une tour et atterrir peinard, merci les biotechnologies. Et si vous refusez d’améliorer vos augmentations, il suffira d’avoir l’œil, de regarder derrière les caisses, dans les recoins et même jusqu’au plafond pour découvrir des bouches d’aération à traverser pour atteindre la suite du niveau au nez et à la barbe des gardes. Les impatients pourront quant à eux profiter d’un arsenal complet, fusil à lunette, fusil d’assaut, fusil à pompe, lance-roquette, fusil à plasma, fusil laser, colt, revolver et j’en passe. Les plus discrets profiteront des derniers nés dans la gamme Flashball et Taser grâce au Prism et le pistolet à électrochoc. Au total, 26 armes si nous comptons les mines et autres grenades, auxquelles s’ajoute deux attaques de corps à corps, une discrète où vous neutralisez l’ennemi sans le tuer en explosant ses bourses, en pétant son bras ou en l’étouffant jusqu’à évanouissement, l’autre, plus violente où vous faites appel à vos deux lames planquées au niveau des avant-bras.

Deus Ex Human Revolution PC - Screenshot 15
Le piratage, utile à toutes occasions

Plusieurs actions vous ferons gagner des points d’expériences qui vous permettrons de débloquer des améliorations pour vos augmentations. La plupart des augmentations sont utiles, faire des sauts plus grand, tomber de haut sans se blesser et même sans faire de bruit, améliorer ses poumons pour résistez à des gaz toxiques, son corps pour être insensible à l’électrocution, résister davantage aux balles, se rendre invisible, déplacer des objets lourds ou exploser les murs, ou encore profiter d’un système vous permettant d’analyser votre interlocuteur durant une conversation qui guidera alors vos propres mots. Vous accumulerez suffisamment d’expérience pour obtenir quasiment toutes les augmentations. Et pourtant, vous pouvez finir le jeu sans vous améliorer une seule fois. Il faudra alors ruser comme jamais, être observateur, lire tous les documents qui vous passent sous la main, faire preuve d’intuition et écouter ce que l’on vous raconte. Le système de dialogue social est tout à fait dispensable, au lieu de démolir à mains nues, vous pouvez le faire avec un explosif, vous découvrirez alors qu’il est possible d’en faire de même avec une porte, histoire de réaliser une entrée on ne peut plus discrète. Une palissade trop haute ? Peu importe, il y a des caisses pas loin et un tunnel d’aération dans le coin, les choix sont loin d’être limités.

Un gameplay à cours d’augmentations

Deus Ex Human Revolution PC - Screenshot 16
Mal de gorge ?

Le tableau en terme de gameplay n’est pas si idyllique que cela, l’IA est seulement capable du pire, jamais du meilleur. Vous pouvez taser un ennemi et les autres accourrons vers lui pour le réveiller au lieu de chercher le coupable, ils seront capables de vous rater alors que vous êtes 30 mètres devant eux sans aucun obstacle pour le regard. Une fois qu’ils vous ont trouvé, n’imaginez pas les voir faire des manœuvres complexes, ils passeront de temps en temps d’un obstacle à un autre. Cela dit, Deus Ex n’est clairement pas pour les joueurs bourrins, les munitions manquent fréquemment alors qu’il faut en réserver une grande partie pour les quatre boss du jeu et en mode le plus difficile (deus ex), nous ne faisons pas long feu. Il faut alors s’en remettre à l’infiltration qui a elle aussi ses limites. Il n’y a pas de gestion des ombres, vous n’avez donc pas à vous soucier si vous êtes à proximité d’une source de lumière qui pourrait alerter quelqu’un. Rien n’inquiète les gardes tant que cela ne se passe pas devant eux, une porte blindée peut être ouverte alors qu’elle est normalement verrouillée par un mot de passe que cela ne les dérange pas le moins du monde, même chose pour une grille d’aération. Au début du jeu, on referme tout derrière soi, puis lorsque l’on voit que l’on peut tout laisser en vrac, nous abandonnons rapidement. Le jeu est tellement simple, même en mode deus ex, que cela nuit gravement à la volonté de refaire une seconde partie.

Deus Ex Human Revolution PC - Screenshot 17
Une cinématique qui laisse à désirer

A l’inverse, les boss pourront vous donner du fil à retordre, sauf si vous vous montrez astucieux. Il est notamment possible de finir le jeu sans tuer personne, même les boss, il faudra cependant avoir ses armes non létales chargées à bloc. Le point négatif est que les boss n’ont aucun intérêt et les cutscenes qui les précèdent ne tiennent pas compte de votre profil (combat ou stealth), le point positif est qu’avec les bonnes armes ou la bonne stratégie, vous pouvez en venir à bout en quelques secondes. Pour finir dans mon rôle de joueur PC aigri, Adam Jensen profite de l’autoregen et devient omniscient dès qu’il se planque derrière un objet grâce à une vue à la troisième personne qui lui permet de profiter de la scène mais pas de faire un très bon jeu d’infiltration. Les plus oldschools désactiveront la touche servant à se dissimuler pour simplement s’accroupir derrière un objet, ils pesteront alors l’absence de lean. Autre objet du délit, le radar, celui-ci est bien trop efficace sans amélioration. Vous pouvez en effet savoir dans quelle direction regardent les PNJ, par la couleur, vous pouvez même identifier s’ils sont ennemis ou neutres. Et cela, sans jamais les avoir vu de vos propres yeux. Une amélioration comme la vision à travers les murs s’avère dans ces conditions être un gadget tout bonnement inutile et l’infiltration est encore un peu plus simplifiée.

Des défauts que nous lui pardonnons

Deus Ex Human Revolution PC - Screenshot 18
Il fallait bien qu'il y en ait un qui termine en prophète

Deus Ex Human Revolution a ses défauts, ils sont nombreux, et nous pourrions en rajouter : des villes plutôt petites et seulement deux avec quelques rues à visiter, des conversations où vous avez tout votre temps pour donner votre réponse et une synchronisation labiale pathétique en VF qui s’accompagne de l’impossibilité de jouer en VOSTFR (possible avec quelques bidouilles), heureusement, les doublages sont plutôt bons avec Marc Alfos en tête, doubleur de Russel Crowe, de Frank Fontaine alias Atlas dans Bioshock ou narrateur dans S.T.A.L.K.E.R. et qui double David Sarif dans Human Revolution. Côté immersion, nous pourrions aussi regretter l’arrivée tardive de Square Enix dans le développement qui a donné droit à des trailers exceptionnels dont quelques uns auraient pu s’intégrer au jeu comme la publicité pour Sarif Industries où les interviews des anti-augmentations. D’ailleurs, Jean-François Dugas, directeur du jeu a avoué qu’il regrettait la mauvaise qualité d’image des cutscenes.

Deus Ex Human Revolution PC - Screenshot 19
De nombreuses pointes d'humour dans Human Revolution

Alors oui, Human Revolution a des défauts, des défauts que nous lui pardonnons sans mal car il redonne vie à une licence que tous les joueurs PC croyaient morte. Globalement, le jeu souffre surtout par des absences que par un mauvais travail des développeurs. En effet, avec les moyens financiers de l’époque, Eidos Montreal qui a bien cru ne pas venir à bout de ce challenge nous offre en définitive un bon jeu qui vous tiendra en haleine pendant plus d’une trentaine d’heures si vous faîtes les quêtes annexes. Nous avons droit à un scénario qui tient la route, où vous croiserez des personnages de Deus Ex, malgré une fin moins crédible (très Deus Ex Machina), une jouabilité de qualité et une immersion réussie. C’est un excellent retour aux sources et un plaisir d’y jouer, une suite qui s’inspirerait davantage de ce qu’il se fait aujourd’hui, notamment en ce qui concerne les nouvelles mécaniques du RPG et des jeux d’infiltration, pourrait indéniablement finir au Panthéon des meilleurs jeux vidéo.