Test de Rage
Il arrive par moment où il n’est pas simple d’introduire un texte. Je sais que j’ai des tas de choses à dire à propos de Rage, j’ai même en tête plein de jeux de mots moisis à vous sortir. En même temps, quand un jeu s’appelle Rage, on ne peut pas y couper, les gars d’id Software devront faire avec. Mon cerveau se fait un peu ramollo ces temps-ci, alors je crois que ne vous trouverai pas d’introduction sympa. En fait, en y repensant, Rage, c’est un peu la même chose : les développeurs d’id Software ne savaient pas comment introduire leur jeu, alors ils nous ont pondu une histoire bancale et inintéressante pour justifier son contenu. Mais ça, on le savait tous : Rage n’est pas fait pour être scénaristiquement intéressant. Le plaisir se trouve ailleurs.
Rage quit ?

Afin de stopper net les Rageux (premier jeu de mots pourri) dès maintenant, éclaircissons quelques points. Rage a eu des débuts assez chaotiques à sa sortie, il faut dire que le développement qui a duré quatre ans s’est fait dans la douleur. Du coup, les bugs ça y va. Mais avouez que cracher sur Rage uniquement à cause de ses problèmes techniques, c’est un excès de facilité et donc pas franchement intelligent. Dit comme ça, nous serions alors passés à côté d’excellents jeux tels que Red Orchestra ou S.T.A.L.K.E.R. qui ont d’ailleurs connu pire niveau bugs. Évidemment, les bugs techniques ne doivent pas non plus empiéter sur le gameplay (Red Orchestra 2 a frôlé ce problème) et heureusement, Rage en est épargné. Plusieurs patchs vont débarquer mais à l’heure actuelle, il est nécessaire de préciser que le jeu tolère assez mal les cartes AMD. Nous sommes d’accord : sortir un jeu bourré de bugs, qu’il soit bon ou non, c’est chiant et il faudra faire preuve de patience. Par chance, j’ai été épargnée de tout souci et j’ai pu jouer à Rage dans des conditions idéales.

Lors d’une annonce d’un nouveau FPS, nous nous posons toujours les mêmes questions depuis quelques années : un énième jeu de guerre ? Un gameplay limité ou pseudo-réaliste ? Un level-design linéaire ? Bref, nous avons toujours peur du pire, après avoir été gavés comme des oies durant l’été avec des FPS indigestes comme Homefront ou Battle Los Angeles (oui, autant faire dans du lourd). N’ayez crainte, Rage ne suit heureusement pas cette voie. Côté scénario, c’est juste une question d’astéroïde qui va s’écraser sur Terre et anéantir pas mal de civilisations humaines. Heureusement, vous, héros du jeu, êtes épargné de ce désastre en étant cryogénisé dans une capsule de survie. Cent ans après, vous êtes accidentellement réveillé et découvrez à l’occasion la nouvelle facette de la Terre… Même s’il s’agit d’un FPS pur et dur, le jeu emprunte quelques éléments utilisés dans les RPG tels que le système de quêtes dans un open world vraiment sympathique, le crafting (utile mais rien de nouveau ni d’original) et d’améliorations d’armes/armures (très minimes mais nous apprécions le geste). Attention, ce n’est pas un RPG pour autant car à part ça, Rage n’a rien à voir, ça reste du FPS bien bourrin et old-school. Tout joueur médiocre à la capacité cognitive limitée vous dira qu’il s’agit d’un Borderlands-bis alors qu’ils n’ont en commun que l’univers Mad Max.
Parlons de l’ambiance et de son game-design, tiens. A part quelques textures vraiment dégueulasses par moment (et ça, même avec des tweaks, difficile de lutter) sur certaines structures comme les échelles, le jeu peut nous offrir des vues magnifiques sans avoir besoin d’une configuration haut de gamme. Et c’est en explorant le jeu de fond en comble que nous comprenons pourquoi le jeu occupe plus de 20Go d’espace disque. Les environnements sont extrêmement variés, à défaut d’avoir des textures détaillées. Certains jeux possèdent des décors sublimes, peu d’entre-eux peuvent se vanter d’avoir un game-design riche et varié. Rage fait partie des rares jeux où, chaque niveau et chaque lieu, nous permet de découvrir un nouvel environnement. Mention spéciale au repaire des Chacals, dont l’entrée a de quoi rendre jaloux n’importe quel univers post-nuke.
La Rage de vaincre

Le gros point fort de Rage réside dans les séances de shooting. Si vous espériez des séquences à la Doom/Quake, vous ne serez pas déçus : jamais les armes n’ont été aussi jouissives à utiliser. Du pistolet classique au canon à impulsion, vous trouverez votre bonheur dans plusieurs armes. Ici, le réalisme est mis de côté, tout est fait pour nous procurer du plaisir à tuer (dit comme ça, hors contexte, c’est un peu louche). Vous pourrez accumuler plus de 1000 balles dans votre inventaire et un arsenal complet sans avoir à choisir contrairement au récent Duke Nukem Forever. Un style de jeu que nous n’avions pas vu depuis des lustres, je remercie Carmack ainsi que toute son équipe pour nous proposer enfin un FPS du bon vieux temps. Il y a toutefois une différence avec les FPS old-school : sa facilité même en mode Cauchemar. La faute à l’auto-regen trop rapide et aux bandages à foison. Cela ne plaira pas à tout le monde et il est dommage de constater qu’il n’y a au final aucun challenge, même si l’on prend son pied à buter du mutant. Certains types de munitions sont également trop puissants et nuit encore un peu plus à l’expérience, comme les cartouches explosives du fusil à pompe qui fait alors office de lance-grenades. Dans ce cas de figure c’est simple : abstenez-vous de les utiliser. Surtout que le bon vieux fusil de base tue déjà les petits mutants en une seule cartouche… Si vous avez déjà joué à un FPS sur PC, commencez directement le jeu en mode Cauchemar si vous ne voulez pas vous ennuyer. Et en cas de grosses difficultés, vous avez le système du défibrillateur qui vous aidera mais dont vous ne pourrez abuser (il met environ 5 minutes à se recharger).
Le level-design du jeu est assez classique et facile à comprendre. Hors-mission, le joueur se trouve dans un open world assez vaste où il peut se déplacer où bon lui semble. La map est surtout favorisée pour les déplacements en bolide, car des bandits rôdent à plusieurs endroits de la map (et à pied, vous n’êtes qu’une petite larve à côté des véhicules ennemis). Cela offre une certaine diversité et une mission vous forcera à faire des aller-retour ; en chemin, vous n’aurez pas le temps de vous endormir. Vous pouvez aussi relever quelques défis en vous débarrassant de tous les bandits d’une zone à l’aide des armes/gadgets achetés pour votre véhicule. La conduite est plutôt agréable (même au clavier) et est clairement orientée arcade. Ces séquences sont certes sympathiques mais manquent quand même d’originalité. Vous avez également la possibilité de faire des courses optionnelles afin de débloquer des certificats pour les améliorations du véhicule. Certaines missions vous obligeront à faire quelques courses afin d’améliorer votre engin. Pour résumer, les voitures apportent un petit bonus au jeu, rien d’exceptionnel même si rien ne vous interdit de vous la péter avec une caisse énorme et tape-à-l’œil avec un turbo surpuissant. Dans le cas d’une mission, le level-design suit un plan bien défini où il est impossible de se perdre : le joueur arrive dans une zone et progresse dans un environnement assez linéaire jusqu’à atteindre le point d’arrivée. Et, comme par magie, une fois la mission accomplie, la sortie se trouve en fait à deux pas de l’entrée. C’est donc une sorte de boucle que vous réaliserez systématiquement à chaque mission.
Fou de Rage

Un détail du jeu m’a beaucoup emballé : la qualité des personnages. Pas dans leur caractère, mais dans l’animation et les détails graphiques. Jamais un personnage de jeu vidéo n’a paru aussi vivant et humain. Lorsqu’une personne s’exprime, celle-ci utilise beaucoup ses mains pour se faire comprendre. Les personnages de Rage agissent très naturellement sans tomber dans le théâtral. Alors que les textures des décors sont très baveuses lorsque nous les regardons à la loupe, les vêtements des persos fourmillent de détails. Une vraie réussite. De même, alors qu’il s’agit souvent d’un point faible dans un FPS, l’IA se débrouille bien dans Rage. Les humains restent assez cons mais les mutants ont en revanche des comportements très surprenants. Un exemple tout simple : un mutant qui vous fonce dessus ne courra jamais en ligne droite vers vous, mais toujours en essayant de vous feinter avec des déplacements sur le côté. Une fois qu’il a réussi sa feinte, il foncera alors comme une flèche. Contrairement aux humains, leurs mouvements sont donc imprévisibles (même si à la fin ils finissent par se prendre une grosse cartouche dans la gueule). Notez que certains boss arrivent à anticiper votre trajectoire.
En parlant de boss, ceux que nous rencontrons sont plutôt originaux (l’un d’entre eux est gigantesque) malgré la simplicité pour les vaincre. La difficulté varie d’un boss à un autre mais globalement, il n’y a pas de souci à se faire. Quant au boss de fin… Eh bien il n’y en a pas. Rien. C’est comme si pendant un film vous assistiez à une scène de déjeuner pour ensuite voir les crédits défiler. Rage c’est exactement ça. Vous enchaînez les missions et sans vous en rendre compte, vous aboutissez aux crédits. Sur le coup, vous serez sûrement sujet à l’impression d’un honteux foutage de gueule. Et vous aurez raison : la fin de Rage est tout simplement pitoyable. Pas de final avec un big boss de la mort qui tue comme dans un bon vieux FPS, id Software a complètement raté son ticket de sortie.
Une bonne surprise
Malgré tout, le jeu constitue une très bonne surprise en comparaison de certains FPS sortis ces dernières années. Rien que pour son gameplay old-school avec des armes au feeling excellent, Rage vaut le coup d’être joué. Si vous prenez le temps de tout explorer, vous en aurez pour une quinzaine d’heures au moins, un temps plutôt correct pour un FPS. Id Software n’a pas non plus oublié ses origines : si vous avez l’œil, vous pourrez trouver les salles secrètes dédiées à Wolfenstein, Quake et Doom (d’anciens jeux du studio). Et croyez-moi, vous vous sentirez vieux en les redécouvrant. Sur ce, je dois vous laisser car j’ai une Rage de dent à faire soigner (j’ai réussi à caser tous mes jeux de mots pourris dans l’article, je suis contente).
Ndlr : Nous ne nous sommes pas attardés sur le multi qui ne tient plus vraiment du FPS, abusant de l’utilisation des véhicules et honnêtement, pas franchement intéressant.