Dragon Age : Origins testé avec ses DLC

En presque quinze ans de vie, Bioware a fait du RPG son domaine de prédilection. En 1998 sort ce qui reste encore à ce jour la référence du jeu de rôle, Baldur’s Gate. Deux ans plus tard, la réputation de Bioware est faite avec Baldur’s Gate 2, puis en 2002, c’est NeverWinter Nights, toujours un RPG basé sur l’univers Donjons & Dragons mais Bioware quitte la 3D isométrique pour une « vraie » 3D. En améliorant ce nouveau moteur et en profitant d’une nouvelle licence, c’est Star Wars KOTOR qui sort en 2003, encore une fois un jeu vidéo que l’on devrait trouver dans toutes les ludothèques. Nous l’attendions et la suite spirituelle de Baldur’s Gate selon Bioware arrive, après le rachat du studio par Electronic Arts, nous aurions pu avoir quelques doutes, fort heureusement, EA n’a pas mis la main à la patte si ce n’est pour la distribution et nous avons le droit de faire des bonds pour le coup, entre la version boîte repoussée sur PC deux jours avant la sortie, les rumeurs selon lesquelles EA aurait demandé aux testeurs de mettre une note exceptionnelle si ces derniers voulaient publier leur test avant la sortie officielle. Mais là n’est pas le sujet et c’est pour cette raison que nous en parlons tout de suite. Ce qui nous intéresse, c’est Dragon Age : Origins et pour l’occasion, ses deux DLC payants (gratuit pour la version boîte ou Deluxe)
Dragon Age : Origins - Bioware

Dragon Age : Origins, l’histoire du fléau.

Après l’univers SF parcouru avec KOTOR et plus récemment avec Mass Effect, Bioware revient aux sources avec un titre heroic fantasy, manière plus ou moins rigoureuse de signaler que les règles du D&D ne sont pas suivis dans Dragon Age : Origins. Annoncé officiellement comme le fils spirituels de Baldur’s Gate, on y retrouve les mêmes rouages, notamment l’aspect très tactique des combats où l’on abuse de la barre d’espace pour pouvoir mettre en pause et donner nos ordres mais aussi la gestion d’un groupe de quatre individus plutôt qu’un héro unique, groupe indispensable pour assurer votre survie et associer les compétences de chacun. Toujours en 3D, nous retrouvons sur PC l’une si ce n’est la caractéristique des Baldur’s Gate, la vue aérienne qui permet une visibilité parfaite sur toute la zone de combat.
Dragon Age : Origins se déroule dans le royaume de Ferelden, étant donné que votre fine équipe n’est pas là pour faire une bête partie de pêche au lac de Calenhad, le contexte est donc trouble et respire l’incertitude sur l’avenir du royaume. Des créatures plus féroces les unes que les autres nommées engeances quittent leur demeure souterraine pour envahir le royaume. La cité d’Ostagar se prépare à défendre ses terres et ses murs à l’aide des Gardes des Ombres, confrérie qui a autrefois repoussé une invasion similaire, Duncan, personnage pour le moins charismatique parcourt la région à la recherche de valeureuses recrues qui voueront leur destin à l’annihilation des engeances et accessoirement, de celui qui les gouverne. Ca tombe bien, vous êtes là. Mais avant d’être recruté par Duncan, vous allez devoir passer par la case prologue qui pourrait à elle seule représenter un jeu (mais pas un RPG), il y en a six au total qui dépendent de votre origine, c’est la combinaison de votre race (humain, elfe ou nain) avec votre classe (guerrier, voleur ou mage). Il ne faut donc que quelques heures pour imaginer le fort potentiel de rejouabilité de Dragon Age : Origins.
Outre la race et votre classe, la création de votre seul personnage comportera tous les éléments nécessaires pour vous rendre unique, apparence, timbre de voix que l’on entendra seulement lors des combats et enfin, la répartition des cinq points de caractéristiques qui vous sont fournis au départ à placer sur six caractéristiques possibles, la force et la constitution plutôt pour le guerrier, la dextérité et la ruse pour le voleur, la volonté et la magie pour le mage. Toutefois, nous résumons ce qu’il convient de faire mais il sera possible de mixer dans la limite du possible, un guerrier ne deviendra pas un voleur à part entière mais aura une corde de plus à son arc au détriment de ses capacités de guerrier. Vos choix de compétences devront être réfléchis. Réparties en plusieurs branches de talents ou de sorts, elles-mêmes divisées en quatre niveaux dont l’accessibilité s’ouvre au fur et à mesure que votre personnage progresse, les compétences et les sorts sont très nombreux et permettent en quelque sorte une spécialisation dans la classe. Le voleur pourrait bien finir comme un vil orateur capable de détrousser avec discrétion son interlocuteur plutôt qu’un expert en crochetage et en piège. D’ailleurs, nous retrouvons cette notion une fois le niveau 7 atteint où vous pourrez choisir clairement une spécialité (habituel dans les MMORPG) à condition qu’un PNJ vous l’enseigne où que vous trouviez le manuel adéquat, il n’y a donc pas d’obligation.

Dragon Age : Origins - Bioware

Une équipe de choc.

Ce qui fait d’un tel RPG un géant du genre, c’est son histoire avec un bon background et ses personnages. Dragon Age : Origins réussit avec plus ou moins de succès à lier les deux, le scénario est crédible dans un univers heroic fantasy imaginé en grande partie par Bioware. Nos compagnons font par contre parfois défaut, si Alistair, Morrigan et Duncan sont charismatiques, les autres sont beaucoup moins marquant, Dragon Age : Origins n’est pas doté de personnages comme Imoen ou le mythique Minsc. Toutefois, n’enlevons rien à Duncan, sorte de Sébastien Chabal qui aurait découvert une paire de ciseaux (plutôt qu’un rasoir) dont le doubleur de Morgan Freeman prête sa voix. D’ailleurs, la version française n’a pas à rougir de sa prestation vis-à-vis de la version originale, Bioware s’est bien entouré. Les traductions sont aussi de bonnes factures pour avoir testé.
Dragon Age : Origins ou Baldur’s Gate, même combat, les dialogues prennent une part importante dans l’aventure, parfois trop, vous partirez dans dialogues parfois fastidieux mais c’est le prix à payer pour pouvoir connaître réellement vos compagnons qui, malgré la disparition d’alignements clairement définis, sauront vous dire quand ils ne sont pas d’accord avec vous. Toutefois, les conséquences sont souvent moins dramatiques que cela auraient pu l’être dans un Baldur’s Gate, la faute probablement à l’absence de l’alignement qui limite déjà votre propre caractère et ce n’est pas ces pseudo histoires d’amour qui rattrapent cet écart de Bioware, après avoir vécu une quête personnelle avec l’un de vos compagnons (avec ou sans histoire d’amour), vous ne ressentirez pas le besoin de refaire une partie rien que pour cela. Contrairement à son vieux frère, Dragon Age : Origins limite la liberté quant à vos réactions et actions avec les PNJ, si l’un d’entre refuse de vous parler, n’imaginez pas que vous pourrez dégainer votre épée ou votre plus beau parchemin pour le massacrer.

Pour le bestiaire qui va avec.

Le bestiaire de Dragon Age : Origins tire largement son épingle du jeu, une pléthore de différents ennemis sont présents et enfin, nous retrouvons des monstres qui ont de la gueule avec des dragons et autres bêtes qui font deux fois votre taille. Vaincre un tel adversaire est très gratifiant surtout que les différents niveaux de difficulté sauront donner du fil à retordre à tous les profils de joueur. Les combats en règle générale sont tactiques, si vous le sentez bien, vous pourrez vous contenter de ne contrôler que votre personnage et vos compagnons agiront d’eux-mêmes grâce aux tactiques disponibles par défaut ou celles que vous aurez créés. Après plusieurs heures passées dans la conception de stratégie, vous pourrez progresser plus rapidement dans l’aventure, la pause restant indispensable pour les plus difficiles rixes. Mettre en pause est l’occasion idéale pour utiliser et même fusionner les atouts de chacun, la synergie créée autour des compétences de chaque personnage permettra de faire basculer un combat en votre faveur.
Des combats où les armes qui s’entrechoquent et où les sorts jaillissent de toute part et ont un impact aussi bien sur les ennemis que sur les alliés pour les sorts de zone et enfin, une grosse dose d’hémoglobine en guise de dessert. C’est spectaculaire et les animations tiennent même parfois de la chorégraphie, toutefois, ce sang omniprésent aura tendance (geek) à rendre certaines cutscenes normalement dramatiques ou romantiques carrément ridicules et vos personnages tombés au combat qui se relèvent comme par magie casse le jeu, réduisant les conséquences de votre stratégie à la simple survie d’au moins, un de vos personnages. Le parchemin de résurrection, très rare, présent dans Baldur’s Gate était un moyen plus intelligent et cohérent pour redonner vie à ses compagnons. Cependant, pour redonner un semblant de réalisme, les personnages qui se relèveront ne seront pas en pleine forme comme si de rien n’était mais gravement blessés, les handicapants lourdement jusqu’à guérison de ces blessures à l’aide de potion grâce à des ingrédients trouvés ici et là dans Ferelden.
Dragon Age : Origins - Bioware

Un univers cohérent dans une région close ?

Nous touchons au plus gros défaut de Dragon Age : Origins, les graphismes subissent les cinq années de développement du jeu, les rides sont visibles sans pour autant en faire un jeu affreux, loin de là, mais, à l’exception des décors intérieurs, ce n’est pas folichon, carton rouge aux environnements naturels qui font mal au cœur tandis que d’autres RPG du même âge ont su montrer le meilleur d’eux. Les visages des personnages sont peu expressifs et pas toujours bien modélisés. Pour couronner le tout, les lieux regorgent de nombreux chargements qui cassent le rythme de jeu en plus de nous faire parcourir des lieux où les murs invisibles qui vous empêchent d’aller plus loin sont légions. Si cela n’était pas gênant il y a dix ans (faute de connaître une plus grande liberté), ça l’est davantage à notre époque. Mais nous ne casserons pas davantage Dragon Age : Origins sur le sujet et la raison est simple, le but d’un RPG est encore de vous tenir en haleine durant des heures et des heures, quitte à vous faire mourir de faim devant votre siège et le bébé de Bioware remplit à merveille cette fonction, les temps de chargement seront l’occasion d’aller vous faire chauffer un plat au micro-onde. La durée de vie de Dragon Age : Origins est exceptionnellement longue, comptez une centaine d’heures de jeu pour arriver à bout des 100%, certains entameront même une deuxième centaine. Cette durée de vie est atout dans un premier temps mais peut devenir inverse dans un second, si les prologues permettent de vivre une aventure plus ou moins différente, de nombreuses phases se ressemblent énormément et lorsque l’on a déjà cent heures dans les jambes, il y a un fort risque que le joueur rechigne à réitérer des actions similaires. Cela dépendra donc de votre propre caractère mais si vous n’êtes pas du genre à vous retaper une histoire dans sa totalité, choisissez bien le personnage que vous incarnerez.
Dragon Age : Origins - Bioware

Topo sur les DLC.

Dragon Age : Origins arborent un puissant toolset capable de grandes choses, il faut du temps avant de le maîtriser pleinement et surtout, si l’on veut créer un module qui en vaille la peine. Toutefois, Bioware utilise cet outil pour nous fournir entre autre, deux DLC payants, ils sont fournis d’office aux possesseurs d’une version Deluxe ou boîte. Le premier est « la forteresse des Gardes des Ombres », dans lequel vous visiterez l’ancien bastion de cette confrérie que la quête principale vous aura fait découvrir de long en large. C’est l’occasion d’approfondir un peu plus le background des Gardes des Ombres sans toutefois être transcendant. Facturé 7 euros pour ceux qui l’achèteront, ce DLC s’adresse surtout aux fans du grosbillisme en vous donnant accès à un set d’armure et l’arme qui va avec à faire pâlir n’importe quel ennemi de l’histoire.
Le second DLC, « le prisonnier de pierre » nous emmène à Honnleath, un petit village dans lequel vous recherchez un golem de pierre. Ce golem qui porte le nom de Shale a le caractère typique des golems que vous avez pu connaître dans Baldur’s Gate, dédaigneux au possible, il lancera quelques répliques cinglantes qui le rendra très attachant aux yeux du joueur. Sur le terrain, il sait se rendre efficace, peut-être trop efficace, il peut tout faire ou presque et avec une réussite qui jalousera n’importe lequel de vos compagnons. Proposé cette fois-ci à 14 euros, c’est beaucoup trop et ceux qui s’y intéressent ferait mieux de passer par la case Deluxe ou version boîte.

Ce n’est pas Baldur’s Gate 3.

Dragon Age : Origins n’est pas Baldur’s Gate 3, linéaire, parfois moins réaliste avec ces joueurs qui se relèvent d’entre les morts et l’inventaire commun qui nous évite de choisir avec parcimonie qui porte quoi, et enfin, doté d’un nombre réduit de personnages charismatiques, ajoutez à cela des environnements pas franchement réussis et un univers qui tente d’être mature sans vraiment y parvenir et nous pourrions croire que Dragon Age est une pâle réplique de son aîné. Cependant, le dernier né de Bioware sait tirer partie de ses qualités, la stratégie est omniprésente, le scénario est d’excellente facture et vous tient en haleine de bout en bout. Nous résumons dans la phrase précédente l’essence même d’un bon RPG, quelques personnages supplémentaires qui vous tiennent à cœur et Dragon Age : Origins aurait été mon jeu de l’année. C’est en tout cas le meilleur RPG de cette année et même depuis The Witcher (qui est encore plus linéaire dans la forme mais beaucoup moins dans le fond) et il est donc inutile de dire aux derniers indécis de foncer dessus car si les fans de Baldur’s Gate auront quelques regrets et toujours des choses à redire, il n’en reste pas moins qu’ils sont eux aussi plongés dans l’aventure Dragon Age.