Test de Yakuza 0
Yakuza 0, la première épopée criminelle en terre japonaise arrive sur PC avec son déferlement de matérialisme de la fin des années 80. L’argent est tout dans l’univers de Yakuza 0 et cela suinte de partout. Ramassez la monaie en battant des adversaires, frappez-les et des billets de banque s’envolent. Chacun des 17 chapitres du jeu se termine par le bilan de l’argent accumulé à travers des activités criminelles variées, le tout est comparé avec insolence comme un multiple du prix d’une voiture de luxe japonaise ou du salaire d’un travailleur du secteur public. Ce RPG de combat à la narration captivante annonce la couleur.

Un univers d’une richesse infinie
L’intrigue et les paysages du jeu tournent autour du Empty Lot, une cour sombre au cœur de Kamurocho, le quartier rouge semi-fictif de Tokyo. C’est ici que vous rencontrez le premier des deux protagonistes, Kazuma Kiryu, un jeune membre du clan Dojima, en train de malmener un petit débiteur. Pour les joueurs PC, Kyriu n’est rien mais pour les joueurs console, il est déjà une légende vivante – le zéro est pour prequel mais vous n’avez pas besoin de connaître les autres épisodes. L’histoire de notre héros prend un tournant lorsque notre victime du jour est retrouvée assassinée là où il l’a laissé.
La mort, dont Kiryu est blâmé, a de sérieuses répercussions dans le monde souterrain de Tokyo car l’Empty Lot est le Saint Graal pour la mafia japonaise, un quartier qui concentre les plus grandes richesses de la ville. Les efforts de Kiryu pour prouver son innocence l’oblige rapidement à quitter la famille Dojima et attire les foudres de ses pairs. Le chaos qui en résulte se propage bientôt dans le quartier de Sōtenbori à Osaka, où Goro Majima, l’autre protagoniste de Yakuza 0, dirige un cabaret. Jadis, un yakuza prometteur, Majima tente de revenir dans le clan Tojo après avoir été expulsé pour désobéissance. Pour prouver sa loyauté, il est invité à effectuer un coup, mais à la découverte de l’identité de la victime commence à remettre en question ses propres motivations. Ainsi commence une somptueuse histoire de trahisons qui vous tiendra en haleine au moins une quarantaine d’heures.
L’Empty Lot est le pilier narratif de Yakuza 0, ce carré de terre sans foi ni loi, est le miroir d’une société où l’individu voue sa vie pour l’argent et les distractions. Alternant entre Majima et Kiryu chapitre par chapitre, vous êtes libre d’explorer Kamurocho et Sōtenbori en suivant l’histoire principale du jeu, en découvrant les très nombreuses quêtes annexes ou en profitant d’une opulente gamme de mini-jeux. Cela va du karaoké (ou je me suis chié dessus la première fois – manette indispensable, même dans ces circonstances, les Yakuza savent) à la machine UFO Catcher, en passant par les parties de poker, les bornes d’arcade Sega, les salons de mahjong, le billard, des courses de petites voitures et bien d’autres encore. Prises individuellement, chaque activité n’a pas un grand intérêt mais mises bout à bout elles complètent avec brio un univers qui s’évertue à vous foutre l’argent sous le pif, ici avec des parieurs compulsifs prêts à mettre des millions de yens sur une table arrosée d’alcool pour un hat trick aux fléchettes.

Authentique et démesuré
A leur manière, ces activités facultatives donnent vie au monde et à l’histoire de Yakuza 0. L’argent a cela dit son utilité pour acquérir le buff ultime qui vous permettra de mettra au tapis les boss qui ponctuent chaque chapitre. Certaines histoires et missions sont liées à ces mini-jeux et servent à éclairer une époque définie essentiellement par ses produits. Yakuza 0 insuffle cette idée jusque dans la nourriture dont l’unique intérêt est de restaurer votre santé ou votre barre de mouvements spéciaux, et pourtant, chaque plat – il y en a des tonnes répartis dans divers restaurants à thème – bénéficient toutes de descriptions individuelles. Le joueur ne peut que se projeter dans un tel jeu, à la fois comblé par le contenu que par la forme. Les environnements urbains sont fascinants malgré des graphismes datés (l’avantage c’est que le jeu est fluide), il faut contempler le soucis du détail lorsque vous vous aventurez dans les ruelles tortueuses de Tokyo et Osaka. La ville ne dort jamais, les jeunes font la fête, les cadres sortent tard du boulot, les sans-abris prennent une bouteille de saké vide pour totem tandis qu’une prostituée vous interpelle.
Yakuza 0 brille également par son écriture, le ton employé, une distribution vaste et pourtant d’une qualité mémorable qui a pour seul défaut de palabrer, chose que l’on excuse voire que l’on déguste dès le deuxième chapitre mais qui a une incroyable capacité à ennuyer en début de partie. La variété des missions est également impressionnante : faites diversion pour qu’un acteur puisse se faufiler jusqu’aux toilettes ou enseignez à une dominatrice timide les différentes manières d’humilier un client, on se retrouve tantôt dans la folie d’un Saints Row, tantôt dans le réalisme d’un Mafia. Derrière des quêtes parfois incongrues, Yakuza 0 vous emmène dans un univers sombre. L’argent y dirige les hommes et les femmes sont des objets exploitées, droguées, tripotées. On tabasse un inconnu simplement car il a eu l’affront de lever les yeux vers vous. Et en même temps, il y a une forme de mansuétude à l’égard de tous ces paumés du monde moderne. Définitivement une claque.

Nous sommes là pour nous battre
La violence est à tous les étages mais elle atteint son paroxysme dans les combats. Les styles de combat eux-mêmes comprennent des attaques légères et lourdes, des blocs et des esquives, ainsi que des coups spéciaux qui sont effectués une fois que vous avez rempli votre jauge de chaleur en infligeant ou en recevant des dégâts. Acquis à des points fixes de l’histoire, ils mélangent des techniques reconnaissables des arts martiaux avec des débordements ubuesques. Le style d’ouverture de Brawler de Kiryu lui permet de traverser des grèves et d’effectuer des démolitions environnementales. Rush le voit se faufiler sur place tout en lâchant des rafales rapides, tandis que Beast lui donne l’envie compulsive de balancer des meubles sur la gueule des passants. Le style Thug de Majima lui permet de désarmer les adversaires tandis que Slugger consiste à faire danser une batte de baseball jusqu’à la mâchoire de votre prochain. Pour finir, Breaker se base sur un contrôle à 360 degrés de vos adversaires. Il y a aussi deux styles secrets qui sont débloqués en complétant certaines histoires annexes.
Vous commencerez donc petit avant de voir vos capacités s’empiler, une progression et une variété intéressantes qui évite toute lassitude. Le gameplay a néanmoins quelques menus défauts, le système de verrouillage est parfois un peu capricieux, en particulier lorsque vous débloquez des mouvements qui en dépendent. Vous ne pouvez pas faire défiler manuellement les cibles, d’une part, et le système se verrouille automatiquement sur celui qui se trouve devant vous et se déverrouille trop facilement avec l’esquive de trop. Si vous avez choisi le plus haut niveau de difficulté, ce genre de situations pourrez vous agacer lorsque le système décide de finalement diriger votre super attaque qui déchire tout sur le freluquet situé à gauche du gros méchant au katana.
Beaucoup de jeux consistent à accumuler les richesses, mais peu le font aussi démesurément que Yakuza 0. Démolir des visages, se frotter à de jeunes demoiselles, devenir un magnat de l'immobilier ou champion de billard tout en faisant la guerre à un empire criminel sont autant de choses qui vous feront vous lever le matin au pays du Soleil-Levant. Mais il s'agit aussi de trouver l'humanité, sous la crasse et la luxure, dans ces petites tragédies et comédies qui font le cœur de ces villes. Merci Sega de nous avoir apporté Yakuza sur PC.
- Game design foisonnant
- Narration épatante
- Variété des activités
- Gameplay abouti
- Vous l'avez déjà sur console