Test : Tropico 3 Absolute Power
Le 29 octobre 2009, Haemimont Games et Kalypso Media redonnaient vie à Tropico grâce au troisième jeu de la licence. Après une escale chez les pirates, les studios ont décidé de revenir aux sources du jeu, une bonne vieille république bananière sur une île des Caraïbes en pleine période de guerre froide. Tropico 3 a su mêler humour titillant nos zygomatiques et missions donnant du fil à retordre. C’est avec un certain plaisir que je replonge dans cet univers dictatorial grâce à son extension Absolute Power mais aussi une certaine appréhension, Tropico 3 était légèrement plus simple que son ancêtre.
Absolute Power débarque sur notre île paradisiaque avec une nouvelle campagne. Mais ne croyez pas que vous allez vous dorer la pilule sur le toit de votre palais en sirotant un petit jus de coco, car les dix nouvelles missions de cette campagne vont vous faire des cheveux blancs durant une trentaine d’heures. Si les trois premières missions ne sont qu’une mise en bouche, la difficulté des suivantes va mettre à mal vos compétences de gestionnaire et vos choix stratégiques. Tandis que Tropico 3 se contentait de scénarios plutôt basiques avec la poursuite d’un seul objectif comme réaliser un certain chiffre d’affaires grâce à notre réseau hôtelier, Absolute Power offre lui, une nouvelle et rafraîchissante perspective du jeu de gestion.
Quelques exemples pour donner une idée, un des dix scénarios consistent à retrouver un tueur en série, votre premier objectif sera de construire un commissariat mais vous apprendrez vite que celui-ci est incompétent pour une telle affaire. On vous conseillera alors les services secrets avant de découvrir que le géant américain et que le bloc soviétique sont mêlés à cette histoire. Dans un autre scénario, votre île est bloquée dans une faille temporelle, vous êtes retournés dans le passé et il faudra réparer la faille alors que vous n’avez accès qu’à un très faible nombre de bâtiments. Le début de cette partie se fait sans immeubles, sans usines, sans établissement administratif, sans établissement hôtelier, bref, il ne vous reste que vos fermes pour espérer.
D’une manière générale, ces scénarios feront appel à toutes vos aptitudes de gestionnaire, il faut être rapide. Sans se précipiter car vous pourriez bien apprendre dans deux mois que vous devez rendre 50 000 dollars immédiatement. Il arrivera aussi que votre objectif ne vous soit dévoilé que quelques années avant la fin de la partie et celui-ci pourrait bien vous demander un investissement à six chiffres. Un chèque particulièrement conséquent pour votre petite île à l’économie instable. Il faut aussi se la jouer stratégique, vous ferez parfois face à des choix cornéliens. Tandis que votre économie est en crise, on vous demandera de sauver ou non plusieurs usines en faillite, en d’autre terme, sauver l’emploi au détriment de votre santé financière ou rester dans le vert au détriment du respect général de vos citoyens. Plus que jamais dans Tropico, les scénarios sont faits de menaces et d’opportunités. Durant la partie, votre conseiller vous proposera de prêter une somme coquette aux américains à un taux d’intérêt attractif. Vous ferez aussi face à un fou qui n’hésitera pas à faire exploser plusieurs de vos bâtiments si vous ne répondez pas positivement à ses requêtes. Votre rôle sera de minimiser les menaces, voire de les transformer en opportunités tout en profitant au maximum des opportunités existantes. Le tout, en gérant les risques, il n’est pas aisé sous les tropiques d’investir 100 000 dollars sur un an après un tremblement de terre et une épidémie même si le retour sur investissement est triple.
Cette difficulté bien supérieure à celle de la campagne de Tropico 3 vous obligera probablement à recommencer la partie. Qui plus est lorsque le moindre choix peut s’avérer fatal pour votre économie. Mais ne pensez pas rejouer exactement de la même manière en évitant simplement de réitérer votre erreur. La difficulté en hausse engendre une augmentation du nombre d’évènements aléatoires déjà bien présents dans Tropico 3. Les requêtes de vos partisans seront plus ou moins aléatoires, conditionnant alors l’ordre de vos investissements et la publication de vos décrets. Tous ces évènements ajoutent du piment au scénario et mettent en avant vos compétences de joueur. Un choix n’est ni bon ni mauvais, son issue sera fonction de votre stratégie.
Une stratégie qui va s’adapter aux nouveautés d’Absolute Power. La faction loyaliste a investi votre île, n’ayez crainte puisqu’elle rassemble vos partisans. Elle vous soutiendra durant les élections et vous protégera en cas de putsch. Elle est particulièrement exigeante et se laisse difficilement convaincre. Pour vous faciliter la vie et pour que vous ayez le pouvoir absolu, de nouveaux bâtiments et de nouveaux décrets sont disponibles. Une école primaire pour lobotomiser vos citoyens dès leur plus jeune âge, une éolienne pour 40 Watts d’énergie propre. Une statue du « Christ le Sauveur » pour que les religieux vous lâchent les baskets, l’arme nucléaire pour dissuader l’URSS et les USA de visiter votre île, la marina pour vos riches citoyens et touristes, une décharge pour limiter la pollution, une statue en or à votre effigie, une piste pour montgolfières histoire de voir votre œuvre depuis les cieux et j’en passe. Le tout accompagné de quelques nouveaux modes de gestion pour certains bâtiments existants.
Des décrets s’ajoutent et les anciens sont remaniés, un nouvel onglet apparaît pour présenter les décrets mégalo-maniaques. Il sera possible de publier votre autobiographie, de lancer une fête nationale ou même d’imprimer vos billets.
Le contenu s’enrichit, il faut bien que l’île s’agrandisse. Autant dire qu’avec Absolute Power, même en trichant, vous aurez du mal à investir toute l’île dans le délai imparti. Un délai qui n’a pas changé et qui reste entre les années 1950 et 2000. Quelques détails viennent s’ajouter, de nouveaux animaux sauvages et personnages. Les bâtiments qui sont démolis laissent désormais place à des gravas inesthétiques. Les routes deviennent des chemins boueux lorsque vous vous éloignez de votre centre-ville. Et tandis que Juanito fera vos éloges à la radio, Betty Boom fera un appel à la rébellion sur une autre station.
Un contenu plus riche, un zeste d’humour en plus, des scénarios plus inhabituels et loufoques. Absolute Power réussit avec brio à mettre en avant ce que Tropico 3 avait mis un peu de côté : vos talents de gestionnaire. Les joueurs continueront d’en vouloir toujours plus, notamment en terme de variété, les villes ont vite fait de se ressembler. La bande son devient lassante et les commentaires radios sont répétitifs. Quelques nouveaux graphiques sur notre communauté ne feraient pas de mal, une fonctionnalité pour localiser les problèmes non plus. Un vrai éditeur de carte serait le bienvenue, le générateur aléatoire a le don de donner naissance à des îles sans âme. Mais malgré ces quelques défauts, Haemimont Games et Kalypso Media parviennent à réitérer leur exploit réalisé sur Grand Ages : Rome, devenu la référence du jeu de gestion pour la Rome Antique, en faisant du duo Tropico 3 et Absolute Power un OVNI du genre. Le meilleur actuellement et pour un tarif particulièrement attractif puisque l’add-on est disponible pour 20 euros. Seul véritable regret, que l’éditeur n’ait pas le budget communication des grands studios du jeu vidéo.